Plongeur-démineur de la Marine nationale
Bernard Lacosta est un vétéran de la plongée sous-marine… Il est né en 1936, à Beaulieu-sur-Mer. Il n’est pourtant pas issu d’une famille liée à la Méditerranée. Comme toute sa génération, il a soif d’aventures et Bernard est tout naturellement attiré par cet élément à conquérir. Cet univers est alors totalement vierge. Tout est à découvrir, tout est à explorer pour un jeune passionné avide de sensations fortes. En 1948, il n’y a pas de matériel de plongée à disposition. Il faut donc tout créer, tout inventer afin de pénétrer le Monde du Silence et découvrir ses merveilles totalement inexplorées. Bernard se confectionne ses propres outils rudimentaires qui lui permettront d’explorer timidement les fonds sous-marins de notre région. Grâce à une chambre à air découpée sommairement et une vitre taillée sur mesure, il fabrique son premier masque de plongée et la vision des fonds de la Méditerranée l’attire à chaque immersion vers de plus grandes profondeurs. Les années passent et c’est en 1952 qu’il se dirige tout naturellement vers la Marine nationale. A 15 ans et demi, il s’engage à l’école des apprentis mécaniciens de la Flotte, à Saint-Mandrier, dans le Var. Et son premier embarquement est effectif pour une durée d’un an à bord du Bambara, un destroyer d’escorte de la Marine nationale.
Au total et sur 6 ans d’engagement, c’est 13 embarquements réalisés par cet aventurier. En 1954, il rejoint l’équipage du porte-avions Clémenceau avec des opérations rescue menées régulièrement afin de récupérer les pilotes d’avions perdus en mer. A bord d’un hélicoptère, il est largué dans des conditions extrêmes avec combinaison, palmes, masque et tuba et surtout avec la légendaire Fenzy orange autour du coup. Mais Bernard veut rejoindre le corps des plongeurs-démineurs et quatre demandes officielles lui seront refusées par le commandement. Je me dirige vers l’école de Saint-Mandrier pour suivre enfin les formations et passer mon certificat… Là, l’apprentissage se fait dans les conditions d’entraînement d’un sous-marin en perdition. Il faut maîtriser les techniques de survie afin de se dégager rapidement d’un sas. Un an de formations techniques chez les sous-mariniers au 3e ESDRA, groupe de plongeurs démineurs, lui feront assimiler toutes les techniques nécessaires à cette qualification extrême.
Missions : pétarader les centaines mines récupérées, entre autres, dans les filets des pêcheurs professionnels. Des mines sous-marines particulièrement dangereuses et qui sont composées de 200 kg de TNT. Des opérations qui seront régulièrement menées en Corse, en Bretagne… Mais également sur toute la Méditerranée. Car le travail après guerre est colossal pour ces baroudeurs. Il faut réactiver rapidement les ouvrages portuaires et débarrasser des fonds marins de ces engins de mort qui tapissent nos rivages.
Premières opérations archéologiques
C’est ensuite des missions totalement insolites à l’époque avec la récupération sur l’épave antique du Titan, à l’île du Levant, dans le Var, sous les couleurs de la Marine nationale, de dizaines d’amphores antiques qui gisent couchées sur le fond marin, à peine recouverte par le sédiment. Trois plongées par jour effectuées afin de remonter des amphores découvertes entre 18 et 40 mètres de profondeur. Nous ne savions pas exactement ce que représentaient ces récipients en terre cuite avec deux anses. Elles ont terminé leur périple dans les dépôts du musée Borelli, à Marseille. Ce musée marseillais sera le premier dépôt officiel de l’Etat concernant les vestiges archéologiques récupérés en mer.
Six ans d’une carrière militaire courte mais bien remplie passée au sein de la Marine nationale et cette aventure militaire prend fin en 1958 pour un retour à Beaulieu, sa commune, son port d’attache.
De retour à la vie active, c’est une formation de formateur en immersion subaquatique qui est engagée, à Niolon, avec à la clef un diplôme officiel de moniteur national de plongée sous-marine numéro 48.
J’ai ensuite et tout naturellement voulu continuer l’aventure et nous rêvions tous d’être embarqué à bord de la Calypso du commandant Cousteau, à Monaco. Avec un ami également issu de la Marine nationale, nous arrivons difficilement à obtenir un rendez-vous avec le Commandant. Et ce jour là, dans son bureau, il nous demande tout de suite en quoi constituaient exactement nos qualifications professionnelles ? Quant à moi, j’étais spécialisé dans l’écoute des sous-marins et mon ami était mécanicien.
Bernard : Vous nous payez combien ? Moins que dans la Marine nationale ?
Le commandant Cousteau : Oui, mais vous serez mentionnés sur le générique de fin de chaque film !
Et l’aventure Cousteau s’arrête malheureusement sur cet échange verbal décevant.
Après c’est le Club Med, à Corfou et en Sardaigne, sur l’île de Caprera afin de prodiguer des cours de plongée sous-marine de qualité. Retour en 1960, à Beaulieu, avec une baraque en bois montée sommairement sur la plage avec un modeste compresseur et l’autorisation accordée par le plagiste de l’époque Guibellini sous la condition d’assurer la sécurité sur la plage en tant maître nageur sauveteur. Le club Barracuda est donc créé et nombreux seront ceux qui pourront profiter de ces leçons sous-marines prodiguées par Bernard de 1960 à 1967.
C’est alors la construction spectaculaire du port de plaisance de Beaulieu. Deux grosses entreprises Fougerolles et Spada se chargeront de ce chantier géant pour l’époque. Bernard participera également à la réalisation des plus gros ouvrages portuaires car la plaisance devient l’Eldorado de la Côte d’Azur.
A bord du Maï Maï 2, ce navire d’exception basé au port de plaisance de Beaulieu, Bernard Lacosta s’est spécialisé, au fil des décennies, dans la pêche au gros en tant master fishing et whales watching. Au cours de milliers de sorties en mer sur toute la Méditerranée et même plus, Bernard est devenu une référence mondiale au sein d’une discipline qui se veut dorénavant totalement respectueuse de l’environnement marin.
Des célébrités du monde du cinéma et de la chanson viendront partager sa passion de la pêche au large avec, entre autres : Johnny Hallyday, Jean-Paul Belmondo, Simone Cousteau, Lionel Hampton, Roger Moore Charles Bronson, Gregory Peck, Gene Barry… Et bien d’autres stars qui rempliront le célèbre carnet de bord de Bernard avec un petit mot et quelques fois un petit dessin marquant de leur empreinte leur visite à bord et cette rencontre avec une figure intacte du monde de la mer.
Eric Dulière.
Destroyer d’escorte Bambara
Pour combattre les sous-marins allemands dans la bataille de l’Atlantique, les chantiers navals américains construisent, entre 1942 et 1945, une série de plus de 500 unités appelées destroyers d’escorte (DE). La Marine nationale en arme six début 1944 pour démarrer sa reconstitution après les pertes de 1942, puis huit autres entre 1950 et 1952, dans le cadre de l’OTAN, le traité de l’Atlantique Nord. Ces 14 bâtiments, devenus les escorteurs type Sénégalais (Bambara, Kabyle, Malgache, etc.), permettent à la Marine nationale d’assurer ses missions jusqu’à la fin des années cinquante, notamment à l’entraînement à la lutte anti-sous-marine et la surveillance maritime en Algérie, en attendant la mise en service des escorteurs rapides issus des programmes d’après-guerre. Acheté aux Américains après la guerre de 39-45, retapé et réarmé ce superbe bâtiment rapide d’environ 100 m de long, le Bambara était basé à Mers el-Kébir (Oranie) pendant les événements d’Algérie, sous les ordres du vice-amiral d’escadre Querville, préfet maritime de la IVe région.
Fiche technique du Bambara : un déplacement de 1650 tonneaux. Longueur : 93 m 27. Largeur : 11 m. Numéro de coque : F719. Date admission au service actif : 1943.
Date retrait service actif : fin 1958, affecté au Groupe escorteurs en complément basé à Mers el-Kébir. Nombre de quartier-maîtres et matelots : 120 hommes environ. Propulsion : 4 moteurs diesel-électrique de 1720 cv. 2 hélices pour une vitesse de 19 nœuds.
Système de combat : 2 canons de 76 mm à l’avant, 3 affûts de 40 mm, 7 affûts doubles de 20 mm, grenades anti-sous-marines, 1 canon de 76 mm à l’arrière.